Le regard de l’historien
Le regard de l’historien
par René REMOND
M. René Rémond, président de la Fondation Nationale des Sciences Politiques a tiré les
conclusions du grand colloque sur le MRP organisé par l’Amicale du MRP le 10 décembre
1996 et publié dans un numéro spécial de la revue France Forum, 2ème trimestre
1997. (france-forum@udf.org
)
En voici quelques extraits
"Identifier trop exclusivement le MRP à la IVème République,
ce serait réduire son existence à un seul moment d’une histoire qui fut longue : la famille de
pensée dont il a été une expression n’est pas née en 1944.
Le MRP s’inscrit dans une tradition qui vient de loin. Symétriquement elle lui a survécu et une
postérité l’a prolongée au-delà de sa disparition.
La tradition dont il recueille l’héritage s’était constituée dans l’entre deux-guerres sur une double
rupture :
- avec le conservatisme politique et social, et
- avec le refus du nationalisme intégral de l’Action Française.
La fidélité à ces choix fondamentaux explique pour partie le dissentiment en 1946-47 avec le général
de Gaulle.
Le MRP a achevé de réconcilier les catholiques avec la politique et la démocratie. La création du MRP
parachève la réintégration des catholiques dans la société politique : l’interdit qui les frappait
est levé ; c’est la fin de l’exclusive tacite qui les écartait de toute grande responsabilité dans
l’Etat.
Leur ralliement à la République est sans réserve : il ne doit rien aux calculs ou à l’opportunisme
et leur adhésion à une conception parlementaire de la République se fonde sur une réflexion élaborée.
Le MRP entend faire du neuf. Le choix même de son appellation
– mouvement et non parti- signifie le désir de créer une formation dont le fonctionnement soit démocratique.
Son activité repose sur des engagements de militants et contribue à démocratiser la vie politique.
Dans deux directions au moins le MRP réalise une avancée :
- il accueille largement des éléments des milieux populaires, ouvrier et agricole,
- il fait la part belle aux femmes…
Son rôle me paraît évident encore dans l’évolution de notre idée de la démocratie :
jadis, elle s’identifiait à une conception de l’unité qui laissait bien peu de place à la
diversité.
La famille de pensée dont le MRP a été une expression historique, n’a jamais cessé de
combattre pour la reconnaissance du pluralisme. Le MRP a ainsi contribué à ouvrir la
République au-delà du cercle relativement étroit de ceux qui entendaient en accaparer la
direction. Il a ainsi contribué à réconcilier la société avec la politique, l’Etat avec la
société civile, la République et la démocratie."
René Rémond
Président de la Fondation Nationale des Sciences Politiques
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