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Pourquoi le M.R.P. ?
Pourquoi le M.R.P. ?

par Fernand CHAUSSEBOURG


Mai-Juin 1940 : la France subit l'une de ses défaites militaires les plus cuisantes - disons même la plus cuisante de son histoire - avec comme conséquences une occupation totale, à partir de novembre 1942, mais surtout un désastre sur le plan de la conscience nationale et sur les plans financiers, économiques et sociaux.

La voix de l'appel célèbre du 18 juin 1940 du général de Gaulle, l'organisation de la Résistance intérieure, les sacrifices d'abord de nos amis britanniques, puis ceux du peuple soviétique et finalement la participation décisive des USA dans la guerre ont contribué à libérer la France mais sans effacer toutes les séquelles de la défaite quatre ans plus tôt.
Le pays doit être gouverné, rétabli dans sa dignité internationale, reconstruit dans son armature économique et sociale, sans céder aux sirènes trompeuses et téléguidées de l'extérieur du marxisme ou plutôt du stalinisme venu de l'Est.

La naissance du MRP a voulu répondre à tous ces défis intérieurs et extérieurs : la renaissance de la France était son premier objectif car elle était sa raison d'être. Il ne sera jamais assez rendu hommage à celles et à ceux qui s'unirent pour cette tâche.

D'où venaient-ils ? Quelles convictions les animaient ?

Dans l'entre-deux guerres les voix, disons des démocrates-chrétiens, étaient dispersées mais elles avaient un écho certain sans que cette force potentielle s'exprime avec un minimum de cohérence dans l'expression politique.
Le Sillon de Marc Sangnier, les élus parlementaires démocrates populaires, la jeune République, les mouvements d'action catholique, l'"Aube" et d'autres publications existaient certes mais ce fut la défaite de 40 et les malheurs de la France qui suscitèrent à la fois l'engagement et dans la Résistance et dans la France libre de la presque totalité des démocrates d'inspiration chrétienne...

Tout naturellement, cet engagement obligea les acteurs à penser, à réfléchir au devenir de notre pays une fois sa libération acquise. Les noms sont connus de ceux et de celles qui permirent la Fondation d'une force politique unifiée regroupant les différents courants de pensée et d'action d'avant-guerre auxquels s'ajoutèrent des femmes et des hommes engagés dans la Résistance.

Gilbert Dru fusillé à Lyon en est le témoignage le plus significatif - celui qui est le "père" pensant du MRP - tout comme Georges Bidault porté à la tête du Conseil National de la Résistance après l'assassinat de Jean Moulin à Lyon l'est au premier chef.

L'acte fondateur fut donc le premier congrès constitutif tenu à Paris en novembre 1944. Le titre du nouveau Parti n'est pas sans intérêt : c'est un mouvement qui, en fait, fédère l'ensemble des militants chrétiens et ne se veut parti des masses stagnantes de la IIIè République, un mouvement Républicain, qui respecte notamment la laïcité de l'Etat mais défend les valeurs chrétiennes et ne conteste nullement l'idée et la réalité du régime républicain, enfin il est populaire c'est à dire qu'il entend servir la justice sociale : MRP, le sigle est bien choisi, chaque mot, chaque lettre traduit cette volonté de changer la manière de "faire" et de "vivre" la politique par rapport aux partis d'avant-guerre, pour beaucoup déconsidérés par la défaite de juin 1940.

Le slogan du lancement du MRP est aussi significatif : "la révolution par la loi". Les changements de structures tant au plan des institutions que dans les domaines économiques et sociaux doivent se faire dans la légalité et non pas par la force d'où qu'elle vienne en particulier des éléments marxistes.
Les dirigeants de cette nouvelle force politique ont vu juste et le pays répond positivement à l'attente ainsi transposée dans le réel et les premières élections tout comme les consultations référendaires donneront raison aux Fondateurs du MRP : Georges Bidault, François de Menthon, Pierre-Henri Teitgen, André Colin, Maurice Schumann, Robert Bichet et tant d'autres peuvent être satisfaits sans oublier la cohorte des militants sans qui rien n'eût été possible.
Le MRP soutient loyalement le général de Gaulle jusqu'à son départ du gouvernement : il ne le suit pas évitant ainsi à la France de voir un gouvernement surgir mené par le Secrétaire général du parti communiste Maurice Thorez. Le parti Socialiste réagit aussi comme le MRP mais sans ce dernier que se serait-il passé ?

Le bilan politique de l'action du MRP dans ces années difficiles d'après-guerre tant sur le plan de la politique étrangère (réconciliation franco-allemande, lancement de la construction européenne, relations avec les Etats-Unis) que sur le plan économique et social (reconstruction des infrastructures, loi sur les conventions collectives, politique de la famille, etc…) est positif malgré les difficultés financières de l'Etat et celles nées d'une décolonisation mettant fin à l'Empire d'Outre-mer de la France, héritage du XIXè et de la IIIè République.

Pourquoi le MRP ? Ces quelques lignes ci-dessus apportent la réponse : un mouvement au service de la République et du peuple français où des chrétiens se sont engagés et ont marqué pour l'Histoire leur forte empreinte pour la renaissance de la France après la défaite de 1940.



Fernand Chaussebourg

- Adhérent du MRP en novembre 1945,
- Secrétaire général du groupe MRP à l'Assemblée Nationale (1950-1963),
- Collaborateur de plusieurs ministres MRP :
  Georges Bidault, Pierre Pflimlin, André Colin, Robert Buron, Maurice Schumann.
- Conseiller général de la Vienne : 1958-1982,
- Président du Conseil Régional Poitou-Charentes, 1980-1981.
- Président de la Fédération Nationale des Comités départementaux de tourisme : 1982-1988